Projet de loi immigration-asile — Table ronde #7

Alors que le projet de loi immigration-asile sera présenté au Conseil des ministres, nous accueillons le juriste Christophe Pouly, chercheur associé à l’école de droit Sciences Po Paris, la juriste Claire Rodier membre du GISTI et la journaliste Julia Pascual du Monde pour débattre des enjeux juridiques et politiques du texte et de son traitement médiatique.

Introduction : 

  • Charlotte Recoquillon, Désinfox-Migrations
  • Hélène Thiollet, CNRS CERI Sciences Po, projet PACE

Intervenant·es :

  • Christophe Pouly, juriste, chercheur associé à l’école de droit Sciences Po Paris
  • Claire Rodier, juriste, membre du GISTI
  • Julia Pascual, journaliste, Le Monde

Compte-rendu

Claire Rodier de l’association Le Gisti commence par présenter les 6 grandes parties du projet : 1- l’accès au territoire, 2- le séjour, 3- le travail, 4- l’asile, 5- l’éloignement et 6- la réforme du contentieux. Sur l’accès au territoire, la mesure est d’augmenter le délai pour le juge de la liberté et de la détention de 24h à 48h pour répondre à des situations telles que celle de l’Ocean Viking.

Pour le séjour, l’obligation d’apprendre le français pour la carte de séjour pluriannuelle (que pour la carte de résident), ce qui risque d’entraîner un blocage pour les titres de séjour plus précaires. Sur les OQTF, si le délai n’a pas été respecté, une interdiction du territoire de 5 ans sera prononcée.

Plusieurs cartes de séjour sont créées avec des conditions générales de respect des principes de la République (écartée lors de la loi séparatisme). Il est également prévu une extension du retrait des cartes de séjour pour menace pour l’ordre public et la possibilité de ne pas renouveler les cartes en cas de défaut de résidence habituelle (au moins 6 mois avant le renouvellement).

Sur les métiers en tension, l’accès immédiat est prévu pour certains demandeurs d’asile au fort taux d’admission (ceux qui ont une chance d’être admis donc). Il y a la création de Pôles territoriaux d’asile (Préfecture, OFII et OFPRA sur le même lieu), sur le modèle de ce qui a été fait pour les Ukrainiens et qui a séduit pas mal. Mais le contexte ne sera pas le même donc cela pose des questions.

Pour la CNDA : il est question de mettre fin au principe de la collégialité et de territorialiser la juridiction avec des juges uniques.

Pour Christophe Pouly, ce n’est pas une grande loi par rapport à la loi Collomb de 2018 par exemple. Elle ajuste surtout par rapport aux considérations politiques actuelles. Il y a des difficultés juridiques en l’état. Pour la conformité avec le droit de l’UE, il y a des aspects qui ne sont pas respectueux. Notamment en immigration familiale ou économique, il faudrait une seule décision et pas deux décisions (préfectorale et consulaire). En matière d’éloignement aussi il y a des difficultés, les dispositions laisseraient plus de marge d’appréciation au juge effectivement. En terme quantitatif cela ne va pas concerner beaucoup de personnes.

Le titre de séjour « métiers en tension » est une avancée, plus facile que la circulaire Valls et moins aux mains des employeurs. Ce que confirme Julia Pascual, qui considère que l’aspect travail est la principale « audace » dans ce texte avec un contexte de +45% de titres de séjours pour l’immigration économique.

Au sujet de l’éloignement, le gouvernement lors d’un brief avait évoqué de façon approximative un potentiel de 4000 personnes concernées par cette mesure. Le message de fermeté affiché n’est pas forcément cohérente avec ce type d’effet à la marge. Le focus sur l’aspect travail démontre qu’il y a une autre forme d’approche sur le débat immigration.


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